Des bonnes herbes et des mauvaises herbes
Voilà un vaste débat qui ne finira pas d’agiter les esprits, entre tenants d’une agriculture intensive au round up et écolo en mal de nature authentique.
Que sont les mauvaises herbes et qu’est ce qu’un bonne herbe ? Et là, je ne parle pas de ce qui peut être roulé dans du papier à cigarette par les amateurs de sensations qui font rire.
Certaines herboristes, botanistes ou phytothérapeutes, dont je fais partie, affirment qu’une mauvaise herbe est juste une herbe dont on ne connait pas l’utilité. Et je suis effaré de voir à quel point sont désignées par ce vocable de mauvaises herbes des plantes extraordinaires telles que le soucis des champs, l’amarante blette (recommandé même par Charlemagne dans le capitulaire de Villis) ou encore le silène enflé, à saveur de petit pois cru.
Ce genre de raisonnement a même failli mener des plantes très communes au début du 20ème siècle à une quasi disparition. on citera le bleuet, une plante dite messicole, qui fréquente les champs, et dont les populations ont été très menacées par les désherbants chimiques. Et pourtant, c’est une plante médicinale très précieuse pour les yeux et utile en gastronomie. Mais peut être que les gens aveuglés par l’agro industrie ne parviennent pas à voir l’intérêt de cette plante…
Les plantes messicoles, une richesse à conserver
Souvent, les plantes qui fréquentent les champs, et qu’on appelle messicoles, du fait qu’elles fleurissent aux moissons, sont des plantes très utiles pour notre santé. Ce sont aussi souvent des espèces intéressantes au plan médicinal.
La plus connue de ces bonnes herbes est le coquelicot, qui est capable de coloniser efficacement un champ de blé, sans que cela soit nocif. Le coquelicot est utilisé pour ses pétales rouges à onglet noir. On en fait un sirop, comme le montre cette vidéo de notre chaine YouTube :
Le coquelicot est un excellent émollient. On en fait aussi de célèbres bonbons, notamment du côté de Nemours.
Et dans le coquelicot, à peu près tout peut se manger : Les pétales bien évidemment, mais aussi les jeunes feuilles, les pistils encore verts, et les graines,qu’on utilisera comme les graines de pavot, un proche cousin du coquelicot.
La camomille et le bleuet sont d’autres plantes messicoles emblématiques. Elles aussi sont très employées commeplantes comestibles et médicinales.
L’adonis du printemps est une plante messicole qui fleurit avant les moissons, mais qui a été beaucoup éradiquée par les désherbants. Certes, c’est une plante toxique, alors me direz vous, quelle importante ? Mais c’est aussi une plante employée en homéopathie, comme bon nombre de plantes toxiques et autres dites mauvaises herbes. Adonis vernalis 5 CH est même utilisé par les homéopathes en cas d’insuffisance cardiaque. Rapprochez vous d’un homéopathe pour vous en procurer.
Rappelez vous toujours ce bon vieil adage de Paracelse : Tout est poison, rien n’est poison, la dose fait le poison. Ainsi, une plante toxique peut être source de remède homéopathique, et ne doit donc pas être éradiquée.
En fait, toute plante a son utilité. Certaines favorisent la fixation du sol, d’autres sont utiles pour les pollinisateurs, et enfin, un certain nombre d’entre elles peuvent nous soigner ou nous nourrir.
La Nature sera toujours nourissière
On oublie trop que l’être humain est issu du sein de la Nature. Et il ne peut pas la renier comme il le fait actuellement, en détruisant ses richesses et son potentiel.
Cela peut lui jouer beaucoup de tours. Ainsi, en France, on a éradiqué de nombreuses haies dans le cadre des plans de remembrement. En réalité, on devrait appeler cela du démembrement, tellement on a amputé la nature d’une partie de sa biodiversité. Tout cela pour favoriser une agriculture intensive, grosse utilisatrice de pesticides, dont on connait les effets cancérigènes, entre autres.
Ce qui est bien dommage, c’est que ces coupes réglées ont fait disparaitre de nombreuses régions des arbustes et plantes buissonnantes très intéressantes.
Citons l’épine vinette, à laquelle on a attribué les pires maux de la terre. Certes, elle peut véhiculer des parasites du blé. Mais elle produit aussi des baies délicieuses, qu’on peut aussi faire sécher ou préparer en confitures. Et que dire du cornouiller mâle, qui est cependant cuisiné même dans des tables étoilés au Guide Michelin, et du cornouiller sanguin, qui est un bon protecteur veineux ?
En réalité, il est nécessaire de pactiser avec la Nature, pourqu’elle puisse continuer à nous offrir le meilleur d’elle même, tout en produisant notre nourriture quotidienne sans la détruire.
Les plantes sauvages au potager
Le jardinier amateur a trop l’habitude de vouloir des plantations dites propres, c’est à dire dépourvues de plantes adventices.
Mais là encore, parmi ces plantes, certaines mauvaises herbes sont absolument délicieuses. Citons la plus commune et la plus banale d’entre elles, la stellaire intermédiaire, qu’on appelle aussi le mouron blanc. Cette plante est souvent dédaignée, alors que c’est une excellente salade sauvage, riche en vitamine C, qui fait vraiment partie des bonnes herbes. N’hésitez pas à la préparer avec des salades du jardin.
Et puis peut croitre aussi le pourpier sauvage, riche en oméga 3. Cette plante succulente est une véritable bénédiction. Elle est facile à nettoyer et produit une crudité rafraichissante et goûteuse.
Alors évidemment, le chiendent peut être vécu comme une plaie, car c’est une plante envahissante. Mais si vous l’arrachez, utilisez au moins son rhizome, qui est un très bon drainant rénal, et qui chasse les calculs urinaires de manière efficace.
D’autres bonnes herbes
Le célèbre herboriste Maurice Mességué avait publié un ouvrage intitulé : C’est la nature qui a raison.
On ne peut que l’approuver, bien évidemment. Et on ne peut que respecter ces bonnes herbes qui nous apportent des saveurs et des bienfaits incomparables.
Parmi les plantes comestibles excellentes pour les papilles et la santé, je peux vous parler de l’ortie ou de la pâquerette, du pissenlit ou du plantain. Voilà des plantes auxquelles on ne prête souvent aucune attention, qui paraissent banales, ou même désagréables. Et pourtant, l’ortie cuite est d’une incroyable douceur au palais.
Et avez vous essayé de cuisiner le serpolet ou la menthe, la bourrache ou la mélisse officinale, la mauve ou la marjolaine ? Ces plantes offrent des saveurs parfois inédites :
- La bourrache avec son parfum iodé qui évoque l’huître.
- La fraicheur de la menthe, qui réveille les sens.
- La mélisse au goût délicatement citronné.
- Le serpolet, proche du thym provençal, et qui en possède une saveur aromatique proche.
- La feuille de mauve est délicieuse poêlée.
- La marjolaine est un aromate à utiliser frais sur des crudités ou séché dans des quiches.
Toutes ces bonnes herbes, nous les faisons découvrir dans nos stages botaniques, où nous dégustons facilement entre 50 et 60 espèces végétales, séchées ou fraiches, en macération alcoolique ou cuisinés dans des plats chauds ou des desserts. Nous vous apprenons à les récolter, à les préparer, les sécher pour faires des infusions, des tisanes ou des décoctions, à les faire macérer dans de l’alcool pour en faire des digestifs (à boire avec modération, bien entendu), etc. Vous pourrez aussi les utiliser pour leurs propriétés médicinales ou en tant que condiment, tel le laser de France, par exemple.
Ce sont toutes des plantes utiles. Il suffit simplement de savoir décrypter le langage de la Nature.